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Réforme de l'assurance emprunteur : les craintes des assureurs

Adoptée à l'unanimité jeudi dernier, la proposition de loi Lemoine sur l'assurance emprunteur va rebattre les cartes d'un marché aujourd'hui chasse gardée des bancassureurs. La résiliation à tout moment est enfin entérinée, mais c'est la suppression de la sélection médicale qui a surpris les professionnels, un dispositif qui remet l'humain au centre mais qui aura inévitablement des conséquences sur la tarification.

Bataille perdue pour les bancassureurs

À compter du 1er juin 2022, les personnes qui contractent un crédit immobilier pourront résilier leur assurance emprunteur à tout moment, sans attendre une quelconque échéance, comme imposé actuellement par la réglementation (loi Hamon et amendement Bourquin). Les contrats en stock y auront accès à partir du 1er septembre prochain.

Votée à l'unanimité par le Parlement la semaine dernière, la loi Lemoine a finalement sauvé les meubles, à la surprise générale, tant le sujet avait divisé députés et sénateurs. Volonté illusoire de quelques-uns ces dernières années, la résiliation à tout moment fait désormais consensus, après un premier refus du Sénat. La mesure remet en question le monopole des banques, 87% de parts de marché, une situation que personne ne peut contester. Il était nécessaire de mettre fin à cette position dominante, qui s'inscrit en contradiction avec le principe de libre choix de l'assurance de prêt, censé être applicable depuis plus d'une décennie.

On peut aussi y voir la défaite des bancassureurs, dont le lobbying n'est pas pu inverser le cours de cette option réclamée de longue haleine par les courtiers, les assureurs alternatifs et les associations de consommateurs. Dans leur rôle pour préserver leur rente, les banques ont sorti l'argument de la démutualisation des risques au détriment des plus fragiles, vite contré par les économies potentielles mises en avant et la libéralisation du marché qui est supposée tirer les prix vers le bas. Et compte tenu des marges juteuses sur le produit (68% en moyenne), la tarification des contrats groupe peut largement bénéficier aux consommateurs si les banques révisent leur politique commerciale.

Suppression du questionnaire de santé : futur séisme ?

Si les acteurs du marché doutaient de l'adoption de la résiliation à tout moment, ils ont été déstabilisés par la fin de la sélection médicale, une mesure qui ne faisait pas partie de la PPL initiale, mais qui a été introduite par les sénateurs lors de la commission des affaires économiques. Dès le 1er juin prochain, la nouvelle réglementation supprime le questionnaire de santé pour tout prêt immobilier de moins de 200 000€ remboursé avant les 60 ans de l'emprunteur (400 000€ pour un couple avec quotité à 50/50). La loi précise que ce plafond s'entend par assuré et pour l'encours total des crédits, ce qui va obliger les distributeurs à procéder à des vérifications additionnelles pour éviter les abus.

À l’automne dernier, plusieurs députés avaient tenté, en vain, de proposer la création de contrats inclusifs qui auraient permis aux personnes malades ou anciennement malades d'accéder à l'assurance sous certaines conditions. Le législateur va plus loin en supprimant, pour tous, ce document discriminant qu'est le questionnaire de santé, et sape au passage la décision du Crédit Mutuel de renoncer au questionnaire pour ses clients fidèles depuis un minimum de sept années.

C'est peu dire que la suppression du questionnaire prend de court les acteurs du marché. Non seulement elle remet en cause le principe même d'évaluation du risque, mais elle arrive très vite, le 1er juin 2022. Le délai de mise en œuvre est fort court, compte tenu de l'obligation d'amender toute la documentation et les conditions générales des contrats. Dans un entretien au journal La Tribune, la Fédération Bancaire Française (FBF), par la voix de sa directrice générale Maya Atig, s'étonne d'une mesure qui "rebat complètement les cartes", ajoutant qu'il va falloir rebâtir un dispositif qui permette de couvrir le risque le plus largement possible".

Vers une hausse des tarifs ?

L'épineux problème est bien celui de la tarification. Le risque n'étant plus appréhendé via le questionnaire de santé, la mutualisation sera portée à son paroxysme, faisant payer le risque incarné par certains par la communauté des emprunteurs. Les bancassureurs assoient déjà leur modèle économique sur la mutualisation des risques. Et comme ils partent avec une très belle longueur d'avance (87% de parts de marché), ils auront toute latitude pour mutualiser davantage et proposer des tarifs compétitifs, face à une concurrence qui ne pourra plus affiner sa connaissance du risque et pourrait voir exploser son ratio "sinistre sur primes".

À l'avenir, certains acteurs du marché pourraient se retrouver avec un portefeuille déséquilibré, constitué d'une majorité de clientèle avec des risques aggravés de santé, ce qui mettrait en péril leur solvabilité. Les craintes d'un renchérissement des tarifs ont d'ailleurs été anticipées par le législateur. La loi Lemoine donne deux ans au Comité Consultatif du Secteur Financier pour observer l'évolution des tarifs et dresser un premier bilan de la réforme.

Les gagnants de la loi Lemoine

Pour l'heure, les grands bénéficiaires de la réforme sont les emprunteurs, en premier lieu les jeunes âgés entre 25 et 37 ans qui représentent plus de 60% des candidats au financement immobilier. Si la résiliation à tout moment concerne potentiellement tous les emprunteurs, la suppression de la sélection médicale profitera avant tout à cette tranche d'âge, le montant moyen d'un crédit chez les jeunes actifs étant inférieur à 200 000€ et la durée maximale de remboursement étant fixée légalement à 25 ans. Les candidats plus âgés sont également gagnants s'ils sont en capacité de miser un apport personnel suffisant pour emprunter moins de 200 000€.

La fin du questionnaire de santé est par défaut essentielle aux personnes touchées par la maladie, qui n'auront plus de surprimes à payer, mieux encore, ne pourront plus essuyer un refus d'assurance oblitérant de facto leur projet immobilier. Selon le courtier Vousfinancer, l'assurance peut représenter deux points d'endettement et faire tomber le taux d'effort au-delà de la limite imposée (35%).

L'expérience du terrain nous dira si l'absence de sélection médicale jouera réellement en faveur des emprunteurs. Un ajustement significatif des tarifs serait alors contre productif en étant facteur d'exclusion. Encore une fois, les bancassureurs sont mieux placés, car ils disposent d’informations relatives à la santé de leurs clients via les relevés de compte. Une problématique nouvelle pourrait voir le jour : celle de l’utilisation abusive de données sensibles.

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