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Assurance de prêt immobilier : la résiliation à tout moment piégée par le Sénat

La proposition de loi n°4453 portée par la députée Patricia Lemoine a été profondément amendée hier en commission des affaires économiques du Sénat. En modifiant l'article qui prévoit le changement d'assurance à tout moment, les sénateurs écornent une nouvelle fois le droit au libre choix du contrat. Le coup est sévère, mais des dispositions permettant de faciliter la résiliation ont tout de même été adoptées. Le texte poursuit son parcours législatif, et l'espoir reste entier que l'Assemblée nationale rétablisse la mesure phare... avant la fin des sessions parlementaires le 28 février prochain.

Suppression de la résiliation à tout moment

Les sénateurs ont mis leur veto à la possibilité de changer d'assurance de prêt immobilier à tout moment et sans frais, rétablissant le principe de changement annuel à date d'échéance

Alors que la proposition de loi pour "un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur" (PPL n°4453) avait été adoptée à la quasi-unanimité par l'Assemblée Nationale en première lecture le 25 novembre dernier, l'amendement 28 vient supprimer la mesure fondatrice de ce texte, vidant de sa substance l'article 1 qui permet à tout emprunteur de résilier à tout moment, non plus en invoquant la loi Hamon ou l'amendement Bourquin.

Le Sénat, à majorité de droite, justifie sa décision dans le compte-rendu de la commission des affaires économiques. La concurrence sur le marché de l'assurance emprunteur fonctionne, selon lui, de façon satisfaisante, les prix ayant reculé de 20% à 40% sans baisse des garanties, oubliant de mentionner un fait implacable, en totale contradiction avec le principe de libre concurrence : les bancassureurs détiennent 88% de ce marché. Autre oubli notable : les banques engrangent une marge moyenne de 68%, un scandale économique sur un produit contraint pour l'emprunteur s'il veut obtenir le financement de son projet immobilier.

La libéralisation du marché de l'assurance de prêt romprait le "bon équilibre atteint" et serait "contre-productif", en pénalisant les emprunteurs vulnérables (seniors et personnes avec des risques aggravés) sans créer d'économies notables pour les profils peu risqués. Sur le terrain, la perception est tout autre. Les courtiers savent pertinemment que le changement d'assurance en cours de prêt génère des gains qui se chiffrent en centaines voire milliers d'euros sur la durée restante d'un crédit immobilier, mais que la substitution profite avant tout aux emprunteurs avertis.

En supprimant la possibilité de changement de contrat à tout moment, le Sénat fait le jeu du lobby bancaire, qui cherche une nouvelle fois à faire primer son intérêt sur celui des consommateurs. D'après Europe 1, il se murmure que Nicolas Théry, président de la Fédération bancaire française et par ailleurs patron du Crédit Mutuel, aurait contacté tous les sénateurs pour les encourager à rejeter la résiliation à tout moment. Rappelons que le Crédit Mutuel a supprimé le questionnaire de santé à ses clients fidèles depuis le 1er décembre 2021, une mesure démagogique qui n'a d'autre finalité que saper le socle de la PPL.

Retour donc aux dispositions de l'amendement Bourquin, avec, toutefois, plusieurs dispositions visant à faciliter la résiliation des assurances emprunteur.

Renforcement de l'information à l'emprunteur

Les sénateurs reconnaissent l'existence de certains "irritants", un euphémisme pour qualifier les pratiques abusives des banques destinées à bloquer toute demande de délégation ou de changement d'assurance. 

Pour y remédier, ils instaurent plusieurs mesures :

  • la clarification de la date d'échéance pour résilier : est retenue la date d'anniversaire de la signature de l'offre de prêt ou toute autre date stipulée explicitement dans le contrat. Cette date devra être précisée sur chaque document relatif au prêt que remet la banque à l'emprunteur.
  • Affichage du coût de l'assurance sur 8 ans
  • l'obligation annuelle pour les banques et les assureurs d'informer leurs clients de leur droit de résiliation et des modalités d'exercice de ce droit.
  • l'exhaustivité des motifs de refus de procéder à la résiliation, et la mention obligatoire quant aux informations et garanties jugées manquantes.
  • un délai contraignant de 10 jours ouvrés pour l'émission de l'avenant au contrat à compter de l'acceptation de la substitution, afin de rendre impossible la perception des cotisations de l'ancien contrat dès lors que le nouveau est activé. La procédure se déroulerait alors sous 20 jours, incluant le délai de 10 jours ouvrés à compter de la réception de la demande de changement.

C'est une bonne chose que l'exhaustivité des motifs de refus, supprimée par la commission des affaires économiques de l'Assemblée Nationale en novembre dernier, soit rétablie. Sans une information complète et circonstanciée quant au rejet de sa première demande de substitution, l'assuré est confronté au risque de devoir représenter sa demande ad vitam eternam.

Un article additionnel prévoit en outre d'interdire toute modification de l'amortissement du crédit lors d'un changement d'assurance. Le législateur veut mettre fin à la pratique de certains établissements qui consiste à prévoir dans l'avenant une modification de l'amortissement du prêt en cas de substitution d'une assurance à prix dégressifs.

En revanche, et on ne peut que le déplorer, l'article 3 bis qui instaurait la mention du coût de l'assurance sur une durée de 8 ans a été supprimé. Cette information, préconisée par le Comité Consultatif du Secteur Financier et réclamée par les courtiers, est pourtant cruciale pour l'emprunteur, afin de mieux orienter son choix en faveur de tel ou tel contrat d'assurance.

L'article 6 prévoit une entrée en vigueur de la loi 4 mois après la date de publication, contre un an initialement prévu. Le délai d'un an ne se justifie plus, puisque la résiliation à tout moment est abandonnée, les modalités du résiliation du droit actuel étant maintenues.

Suppression du questionnaire médical sous certaines conditions

Dernière mesure adoptée par la commission du Sénat, et non des moindres, la suppression du questionnaire médical sous deux conditions cumulatives :

  1. le montant du prêt doit être inférieur à 200 000€, soit un montant proche du montant moyen d'un crédit immobilier en 2021 ;
  2. la fin du remboursement du crédit doit intervenir avant les 65 ans de l'emprunteur, soit avant la fin de la vie professionnelle de celui-ci.

Cette mesure viserait à faciliter l'accès à l'assurance de prêt aux personnes victimes de problèmes de santé, et bénéficierait en priorité aux emprunteurs âgés de moins de 45 ans. 

L'article 7 initial, qui prévoyait d'inciter les signataires de la convention Aeras à entamer des négociations en vue d'améliorer le dispositif, est jugé "décevant" par les sénateurs, qui préfèrent "placer les assurances face à leurs responsabilités", étant donné le niveau élevé et injustifié de marges réalisées en assurance emprunteur.

Il est tout de même important de noter que la banque prêteuse bénéficie de toutes les informations concernant un emprunteur et que son état de santé peut être visible sur ses comptes en banques grâce à ses prélèvements.

Le jeu politique à l’œuvre

La députée Patricia Lemoine s'est dite "attristée" que les sénateurs aient supprimé la possibilité de changer d'assurance emprunteur à tout moment. Elle estime que sa PPL est aussi victime des manœuvres électoralistes de certains à l'aune de l'élection suprême. Pas question de faire un cadeau à la majorité présidentielle qui permettrait à son candidat de capitaliser sur une mesure en faveur du pouvoir d'achat des ménages indolore pour les finances de l'État. Rappelons que le gouvernement soutient le principe de changement à tout moment, et a engagé une procédure accélérée pour la PPL le 2 novembre dernier.

Le texte amendé doit être examiné en séance plénière au Sénat mercredi 26 prochain. Si les sénateurs valident les modifications, la PPL passera en commission mixte paritaire début février en vue d’établir un compromis entre députés et sénateurs. Sans accord, une deuxième lecture par les deux chambres sera nécessaire, le verdict final appartenant à l'Assemblée Nationale, si tant est que le calendrier le permette. Le compte à rebours est lancé pour le changement d'assurance de prêt à tout moment.

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